Perspectives du paganisme

Publié le par PFI France

Approche de la Table Ronde, COLLOQUE PFI 27/28 avril

Nous considérons traditionnellement les religions païennes comme des religions qui se sont développées à l’état « naturel » dans un contexte spécifique. Celui d’un pagus, d’un pays , d’un temps, d’une sensibilité particulière.

Certains d’entre nous diraient en accord avec « l’esprit du lieu » 

A l’opposé des abstractions souvent réductrices portées par les différent «théismes », le paganisme redécouvre la diversité de la vie, la richesse du particulier, la proximité des Dieux.

Gardons nous de considérer ce sentiment de proximité comme une sorte de retour à une mentalité primitive ! Au contraire, il s’agit au contraire d’une vision moderne, intégrante, consciente, délibérée qui nous remet à notre juste place, au sein d’un ensemble vivant qui a du sens et qui donne du sens.Dans cette vision, l’ Homme n’est ni un Maître, ni un consommateur de la Nature. Il en fait partie et à ce titre participe à un « Ordre Sacré » qui inclus tout ce qui existe. Même s’il existe une différence de fonction .

Notre pratique nous inscrit dans un ensemble complexe. Un monde qui parle et nous inspire. On ne s’étonnera pas dans ce cas que le païen puisse prier près d’une source, d’un arbre ou d’un rocher !

Si le paganisme est « moderne » c’est qu’il répond à des préoccupations très actuelles Mais il n’en reste pas moins « traditionnel » ! 

Au-delà de son antiquité « historique » beaucoup pensent qu’il déploie ses racines en profondeur. Dans les profondeurs même de la nature humaine. 

De là à poser que le paganisme est une religion naturelle consubstantielle à l’humanité il n’y a qu’un pas.

Le paganisme historique est celui des différentes sensibilités ou mouvements qui le composent. Dont la raison d’être est liée à l’esprit du lieu ou à l’esprit du temps. 

Mais il existe probablement en chaque homme une religiosité «naturelle», a-temporelle dont la paganisme est l’expression la plus forte.  

L’Homme est un animal religieux, qu’il soit occidental et actuel, ou Néolithique , il a besoin d’exprimer sa spiritualité. Il a besoin de trouver un "lien" avec le sacré pour orienter sa Vie.  

Il est probable que la différenciation entre ce qui est du domaine religieux et ce qui est du domaine profane soit une distinction assez récente.   

Est ce lié à l’émergence de l’individuation , de la rationalité, de l’esprit critique ? 

Quoiqu’il en soit nous ne pouvons y échapper. 

L’individualisme, une liberté gagnée depuis peu, un esprit d’indépendance nous ont éloigné des dogmes et des codes.  

Notre société est devenue prévisible, rationnelle. Elle n’a plus recours aux Dieux pour expliquer le Monde . 

 

Et pourtant : ……. 

 

Nous avons repris contact avec notre corps, longtemps méprisé. Nous avons commençons à retrouver le chemin de nos émotions longtemps contraintes Nous nous sentons liés au cosmos et à la Nature. Nous connaissons la valeur du rêve, de l’imaginaire Nous sommes en quête de sens mais nous n’avons plus recours aux dogmes pour répondre à ce besoin. Notre culture fait que notre foi est éclairée par la raison . En ce sens c’est une foi « adulte », « tolérante » . Nous connaissons les limites de l’intelligence froide , celle de la technologie, de la consommation des biens et cette connaissance nous autorise à remonter vers les sources du Sacré.  

Les mystiques opposaient le corps et l’âme. Le modèle hérité de l’époque des Lumières oppose l’âme et l’esprit. Ou plutôt font de ce dernier le maître et juge intransigeant de la maison. Les Dieux se sont éloignés. L’Eau ne chante plus, les forêts sont vides. L’esprit suffit, il n’a plus besoin des Dieux. Il a réponse à tout, a un avis sur tout et serait le seul capable de produire du bonheur.  

 

Tandis que le progrès lumineux nous promet des lendemains qui chantent, nous nous retrouvons dans un monde sans rêve et sans magie. Nous en sommes arrivés à nous interroger sur l’avenir immédiat : celui de nos enfants. Sur une planète en surchauffe, bercés des illusions du progrès et de la croissance permanents. Le désenchantement dont il est souvent question a atteint son paroxysme avec une société de surconsommation ou le moindre hasard est traqué. Ou tout est analysable, programmable…..marchandable ! La raison triomphante montre ses limites, un nouveau mythe est en train de s’écrouler !  

L’Homme moderne éclairé de toutes parts a perdu son ombre et par conséquent a perdu du relief.

Chez l’occidental moyen, il y a une blessure profonde entre les nécessités de l’esprit , celles de l’âme et celles du corps. Et c’est peut être le propre de la spiritualité païenne actuelle que de guérir cette blessure. Celle qui coupait l’Homme de la nature, celle qui séparait l’esprit et le corps, la froideur de la raison et la chaleur des émotions Si on se réfère aux études des spécialistes de la question, le païen occidental moderne est un citadin avec un certain niveau d’études et donc une certaine culture. Nous ne sommes pas sauf exception dans une religion transmise mais bien dans le cadre d’une approche dynamique. Une recherche intellectuelle ou spirituelle active. Sauf pour quelques uns d’entre nous, le paganisme n’est pas une religion transmise mais une religion voulue ! 

 

Il n’est pas non plus une reconstitution du paganisme antique.

Même si nous essayons d’y retrouver les sources vives du Sacré. Même si nous sommes attachés au monde par nos racines.  Nous ne sommes pas enchaînés par l’histoire. Du moins pas par celle que l’on veut bien nous conter.

Nous prétendons au contraire que le paganisme est actuel, qu’il est vivant , qu’il s’adapte aux lieux, au temps... Bref nous re-créons 

Il y aurait d’ailleurs un parallèle intéressant à faire entre re création et récréation. 

Mettons donc le nez dehors !
Sortons des placards poussiéreux du prêt à penser ! 
Et osons dire ce que nous sommes.
Des Etres humains debout, qui revendiquent le droitde prier qui ils veulent.

Mais revenons à notre propos 

Même poussé par un mouvement naturel , le paganisme a encore sa place à faire.  

Lorsque nous parlons de racines, nous parlons de nos ancêtres. Pas seulement familiaux ! Ceux que constituent les archétypes qui alimentent notre imaginaire
Et …si nous puisons des repères dans l’histoire nous savons ce que sont des mythes fondateurs.  

Bien que jaloux de leur liberté les païens se revendiquent pour la plupart d’une tradition.  

Tradition, lignée, école… Le mot tradition prend d’ailleurs dans le vocabulaire païen une connotation toute particulière. Plutôt que de recourir au dogme, au «catéchisme», la tradition dénote d’une sensibilité, d’un cheminement, d’un mode de contact particulier avec le monde spirituel.

La tradition véhicule des symboles plus que des réponses. Elle est donc obligatoirement ouverte sur le monde, adaptative, vivante.  

Et c’est probablement de ces approches traditionnelles que vont débattre les orateurs de ce midi. De la même façon le monde païen s’attache plus à l’éthique qu’à la morale. Si nous nous entendons sur quelques valeurs. Le quotidien se charge de nous rappeler que l’Homme est fait d’ombre et de lumière. Liberté, ouverture, éthique… nous sommes loin de la dichotomie rassurante entre la Vérité et le faux, entre le bien et le mal, le permis et l’interdit… 

 Et c’est à la façon d’affronter ces contradictions, de trouver sa juste place dans ses rapports avec les autres et de trouver en soi une certaine cohérence que peut s’évaluer la richesse d’un parcours païen.  

Tandis que certains considèrent les choses avec une certaine lucidité souvent mêlée d’humour, d’autres restent la proie d’une information pléthorique qu’ils digèrent mal et qui n’apporte que la confusion.  

La plupart d’entre nous souhaite vivre en Paix dans un Monde vivant et porteur de sens. Et ce n’est pas encore si facile que cela.  

Tandis que les religions majoritaires doivent faire face aux crispations traditionnalistes, le mouvement païen peine à se faire reconnaître, à se faire accepter. D’un coté des positions fondamentalistes qui ne craignent plus de s’affirmer, de l’autre des gens parfaitement tolérants, respectant le monde et les Dieux qui doivent encore se cacher pour prier . Et que l’on ne nous dise pas que cela fait partie de notre folklore. Voilà donc brossés en quelques traits imparfaits ma situation telle qu’elle semble se présenter à nous. Des mouvements païens qui se rejoignent sur la nécessité de réinvestir le monde de sens et d’âme mais qui diffèrent sur la façon d’y parvenir.

A bien y regarder l’apparent foisonnement de nos mouvements est trompeur. Il est trompeur dans la mesure où il ne fait que résister aux tentatives de classification, organisation, normalisation… De multiples mouvements aux sensibilités particulières qui se font, se défont, vivent et meurent ... Au fond comme le feraient différentes espèces d’un milieu naturel. Nous sommes loin du « mono » ... de la pensée unifiante, de la mono culture. Au contraire, les différents mouvements païens sont riches. Riches de leur diversité, riches de leur différences..

Encore faut ils qu’ils se gardent de succomber aux tentations totalitaristes. Le païen peut être Homme de conviction sans pour autant vouloir les imposer aux autres. Le païen ne peut pas être missionnaire.  

Alors je vais bientôt conclure sur cette approche imparfaite.

Quelles perspectives?

C’est le sujet du débat 

 

Quelles perspectives d’évolution ? Quelles perspectives spirituelles ?

Si je devais résumer ce qu’est pour moi l’objet d’une fédération comme la notre ce serait « De nous permettre de prier en paix »

Pour cela il faut , et il y a une certaine injustice dans tout cela , qu’on nous en reconnaisse le droit. Droit d’exister, droit de faire état de notre foi. Encore faut il que nous soyons crédibles.  

Malheureusement, la société de spectacle, l’hédonisme ambiant, les vieilles lunes de la vérité unique font que des sensibilités s’opposent, des paganisant s’affrontent. Rien de nouveau sous le soleil dira t’on ! Si ce n’est que ces guerres de chapelles ( le mot est bien choisi) nuisent à notre crédibilité, aux efforts que quelques uns font pour que l’on puisse reconnaître nos croyances.

Une citation avant de conclure .

Voici ce qu’on trouve sur certains sites prônant par ailleurs l’amour d’un Dieu Unique

 « Tout paganisme doit disparaître au souffle de la prédication évangélique et céder devant le royaume de Dieu. L'histoire montre l'éclatement de toutes les religions et sagesses païennes quand s'affrontent les deux grandes puissances d'apocalypse, le Christ et l'Antichrist : du paganisme ne reste alors qu'un folklore vidé de toute valeur religieuse. »

S’il le mot « paganisme » était remplacé par celui d’une des grandes religions majoritaires. On aurait immédiatement droit à une levée de boucliers ….
Justifiée d’ailleurs.
Serions nous encore les cibles de quelque guerre sainte ?   

A nous de nous montrer assez forts , et de donner tort à ceux qui prédisent notre perte A nous de démontrer la valeur de nos croyances. C’est ce que vont faire maintenant nos orateurs.

Eber  

 

Publié dans pfifrance

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R
merci pour ce texte et son exhortation à sortir du "placard poussièreux du prêt-à-penser". Je retrouve dans ces lignes l'essentiel de mes préoccupations/convictions et du coup, je me sens moins seul
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